Lors de l’intervention de Jérôme Elias, spécialiste du cinéma, les élèves d’Arts Visuels ont pu étudier le code de censure dit Hays et son impact sur la mise en scène de films tournés aux États-Unis.
Qu’est-ce que le code Hays ?
Le code Hays, c’est un code de censure mis en place par le président de la « Motion Pictures Producers and Distributors Association » de 1934 à 1966. Il consiste à interdire à l’écran l’apparition de violence, les scènes à connotations sexuelles, ou les antihéros susceptibles d’être aimés par le public. Le code Hays a éloigné le grand public du cinéma et donné du fil à retordre aux scénaristes durant une partie du XXe siècle, mais il aura tout de même réussi à dévoiler la créativité et l’ingéniosité de certains réalisateurs comme Alfred Hitchcock. Aujourd’hui, la MPAA décide surtout de la classification des films et de leur interdiction au jeune public (-18 ans, -16 ans, -12 ans…).
Hitchcock : La violence suggérée
Hitchcock faisait partie des réalisateurs assez imaginatifs, pour contourner le code Hays. Nous avons étudié une des séquences de Psychose. Cette scène nous montre le meurtre d’une jeune femme prenant sa douche, mais avec des procédés cinématographiques permettant d’éviter la censure. Par exemple, Hitchcock a filmé le tueur en train de poignarder la jeune femme sous la douche. Pour éviter qu’on la voit nue, il ne la filme pas en pied ou plan rapproché, mais « découpe » son corps en une série de gros plans évitant soigneusement la poitrine. Lorsque le couteau touchait la peau de la femme, le plan était coupé afin de ne pas voir le couteau rentrer dans le corps de l’actrice. Puis, en insert, un fluide de couleur noire se dirigeait dans l’évacuation de la baignoire afin de faire croire à du sang. Ce liquide était en fait du chocolat chaud dilué, le choix du « noir et blanc » atténuait la violence et l’actrice n’était pas aspergée. En revanche, des plans courts montés en « cut » (coupures brusques et nettes), soulignés par une musique stridente de violons faisaient palpiter le cœur du spectateur.
Arthur Penn : « La mort face caméra »
Lorsqu’Arthur Penn décida de tourner « Bonnie & Clyde », le code Hays venait d’être levé. Cela permettait d’être plus libre dans la production du film et de laisser apparaitre des scènes à la violence plus marquée. Ce film et d’autres après lui ont permis d’à nouveau attirer les spectateurs dans les salles obscures. Mais pourquoi les jeunes réalisateurs de l’époque voulaient-ils montrer la violence crue ? C’est qu’avec l’assassinat en direct du président JF Kennedy et avec la guerre du Vietnam, les téléspectateurs s’étaient habitués à la violence réelle du quotidien. Il semblait alors inutile et hypocrite de la leur masquer au cinéma. Arthur Penn n’avait pas à détourner le code Hays, donc les meurtres et autres actes de violences étaient affichés de manière à être proches du réel. On pouvait donc finalement voir en plein cadre un homme « se prendre une balle dans la tête », des baisers langoureux, des corps criblés de balles. On pouvait aussi adopter le point de vue d’un anti-héro, d’un gangster, d’un « looser » et plus seulement celui de la morale et de la police.
Ainsi naissait le « nouvel Hollywood ».
Et vous, auriez-vous pu vous contenter de regarder en boucle « Plus belle la vie » ou « Les feux de l’amour » ?
Dimitri Husson / 2D8